The Last Kiss, Massimo Pedrazzi

Sur la toile et plus particulièrement à travers les réseaux sociaux, il y a une peinture moderne qui est souvent partagée pour illustrer la thématique de l’amour. Ou peut-être plutôt un amour qui n’est plus, si on s’en réfère au titre.

The Last Kiss

Cette peinture s’inscrit dans une esthétique qui évoque à la fois le symbolisme et le romantisme, avec une touche contemporaine dans son exécution.

Peinture représentant une femme et un homme allongés dans l'eau et qui s'embrassent. Leurs lèvres se touchent à peine. Ils sont nus, et allongés dans l'eau. Seule une partie infime du visage de l'homme apparait. Son corps étant sous l'eau.
The Last Kiss, peinture par Massimo Pedrazzi

Elle évoque une dualité entre le rêve et la réalité, entre l’amour et l’abîme. Une figure au regard envoûté, se penche vers un visage tout juste émergé. Leurs lèvres s’effleurent dans un baiser suspendu.

Les tonalités profondes de bleu et de vert confèrent une atmosphère onirique, presque mélancolique, où l’eau devient à la fois un miroir et une frontière.

La douceur du geste contraste avec la symbolique silencieuse de la scène.

La fragilité de l’instant éveille à la fois la vie et la mort ;

– et si c’était en fait une fin et un commencement.

Les origines de la peinture The Last Kiss

The Last Kiss de Massimo Pedrazzi est une peinture basée sur une de mes photographies.

C’est un cliché en noir et blanc réalisé à Miribel en 2014. Elle est la vitrine de mon cycle poétique Flou sentimental et s’intitule Noyer le passé, embrasser l’avenir.

Parmi toutes mes créations, c’est la seule dont le résultat correspond en tout point avec l’image que j’avais en tête. Une seule, parmi des centaines.

Vous l’écrivant, je ne peux m’empêcher de vous livrer en citation ce passage d’une correspondance de Fyodor Dostoïevski.

J’ai plein la tête et l’âme, des germes de visions qui passent et se laissent percevoir. Mais ne font que passer, or il faut les incarner complètement, et cela se produit à l’improviste et d’un coup, sans qu’on puisse dire au juste quand cela se produira ; ce n’est qu’ensuite, une fois que le cœur a reçu l’image dans sa plénitude qu’on peut passer à l’exécution.

Ce texte est un pilier fondateur pour moi, et à bien des égards.

Il a contribué, et il le fait encore, à édifier mes us et rituels dans la pratique de la photographie. Il a notamment forgé mon esprit. J’ai soif de connaissance plus que de reconnaissance. J’accepte mes échecs, et je les élève en jalons ; en témoins de la personne que j’ai été et que je suis.

Mais revenons en à ce qui nous intéresse.

Cette photo est la conclusion d’une session qui avait déjà amené des clichés satisfaisants.

Ce jour d’été, j’étais convaincu. C’était le moment de tenter d’incarner l’image que j’avais en tête. Je me souviens encore de la façon dont j’ai abordé sa réalisation. J’ai demandé à Julien de faire totalement confiance à Camille. Il avait une seule instruction, celle de s’allonger dans l’eau et se laisser guider par sa co-modèle.

Photo de Julien juste avant la réalisation du cliché "Noyer le passé, embrasser l'avenir"
Julien en totale confiance

Noyer le passé, embrasser l’avenir

Camille immergea lentement le corps de Julien, puis en partie le visage. Ne resta alors qu’un masque, une figure du passé. Un monde à embrasser.

Photo à l'origine de The Last Kiss
Noyer le passé, embrasser l’avenir

The Last Kiss de Massimo Pedrazzi raconte une autre histoire que celle que j’ai voulu porter au réel. Et c’est tant mieux. Car dès lors qu’une création est livrée et portée aux yeux du monde, libre à chacun de l’accueillir comme bon lui semblera.

Mon avis concernant cette peinture

Le voyage

J’ai publié cette photo pour la première fois sur Facebook, via ma page Flou sentimental à l’été 2014. Je me souviens qu’après l’avoir mise en ligne, ma page avait gagné près de 6000 abonnées en une soirée. Il y a eu des centaines de partages.

Par la suite, elle a aussi été utilisée à de très nombreuses reprises sur la toile (sites Internet, Tumblr, Twitter, Instagram etc) et dans différentes langues. Le plus souvent, sans mention de l’auteur. Il fallait s’y attendre, j’avais signé de ne pas signer mes photographies. D’ailleurs, je n’ai jamais cherché à savoir si mes photos avaient voyagé en dehors de ma sphère de connaissance et l’audimat composé de mes abonnés. Ce sont des messages d’internautes bienveillants qui m’alertaient à chaque fois et craignant qu’autrui puisse exploiter le fruit de mes créations.

Mais alors, qu’en est-il de cette peinture ?

Je dois vous l’avouer, c’est un notification à mon attention qui m’a fait découvrir cette œuvre. Ce que je constate c’est qu’elle voyage beaucoup plus et beaucoup plus loin que la photo dont elle s’inspire.

Cela me fait de la peine. J’ose croire, en toute humilité, que le message à la fois personnel et universel de ma création mérite de trouver écho auprès du monde. Même si elle voyage seule et sans nom, sans paternité.

Cela me fait plaisir. Une de mes créations a su inspirer un peintre. Un artiste qui a dans le même temps donné un autre sens à ma photo. Peut-être même que mon intention de départ est également présente dans l’œuvre que Massimo Pedrazzi a livré au monde.

Dès lors qu’une création est livrée et portée aux yeux du monde, elle ne nous appartient plus.

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